Bienvenue Katia, Svetlana et Vania !
Katia, Svetlana et Vania sont installés dans le logement communal de La Chevallerais depuis le mardi 5 avril. Touchées par l’accueil des Chevalleraisiens, mère et fille demeurent inquiètes et espèrent rapidement retrouver leurs proches en Ukraine.
Elles se réveillent encore chaque nuit. Elles appréhendent chaque bruit, chaque voiture qui passe dans le bourg pourtant si calme de La Chevallerais. Katia, 29 ans, et sa maman Svetlana, 50 ans, ont vu et vécu l’horreur. Le 24 février dernier, dès 4h du matin, elles sont tirées du sommeil par le bruit des bombardements, à Kharkiv, ville située dans l’Est de l’Ukraine. Trois jours plus tôt, en se baladant dans un parc de cette cité d’un million et demi d’habitants, elles ne croyaient pourtant pas à la réalité des menaces russes : « On avait juste un petit pressentiment. Mais ça semblait tellement inimaginable… C’est limite si on plaisantait sur le sujet, en disant qu’on allait devoir prendre nos affaires et partir », se souvient Katia.
Malgré les bombardements, les deux femmes décident dans un premier temps de rester à Kharkiv. Katia habite au rez-de-chaussée d’un immeuble. Un maigre avantage en temps de guerre. Lorsque les sirènes retentissent, elle se réfugie du coup plus rapidement au sous-sol. Elle invite donc sa maman à venir vivre avec elle et son mari. Pendant 10 jours, la famille évite soigneusement de s’éterniser devant les fenêtres du logement. Trop dangereux. Elles vivent tantôt dans le couloir de l’appartement, tantôt au sous-sol de l’immeuble. À cette époque de l’année, dans cette zone frontalière avec la Russie, le mercure descend parfois sous les moins 10 degrés. Très vite, Vania, 5 ans, le fils de Katia, prend un coup de froid. C’est lorsqu’elles sortent acheter à manger et des médicaments que leur immeuble est bombardé. Il est en partie détruit. Katia et Svetlana sont confrontées à la vision de cadavres… C’en est trop. Nous sommes le samedi 5 mars. Elles prennent la lourde décision de quitter le pays, avec Vania bien entendu, mais sans le mari de la jeune maman… « Si je n’avais pas eu mon fils, je serais restée. Mais là, c’était impossible, je ne voulais pas confronter mon enfant au danger ».
Elles embarquent dans leur voiture ce qui leur tombe sous la main. Elles prennent d’abord la direction de la Pologne. Trop de monde. À bord de leur petite Mitsubishi, elles poursuivent donc leur périple jusqu’en France, et jusqu’à Nantes où une vieille connaissance de Svetlana lui propose le gîte pour quelques jours. Elles font ensuite des démarches préfectorales et obtiennent une chambre d’hôtel pour 10 jours. Avant d’être invitées à rejoindre La Chevallerais et de s’y installer voilà une semaine.
Le logement communal est fin prêt pour les recevoir dignement. Nettoyage, retouches de peintures, changement de toilette, des luminaires, etc. La mobilisation des Chevalleraisiens et des communes voisines est exceptionnelle. Des habitants offrent des produits d’hygiène, des meubles, des plantes… L’un d’entre eux déniche même une gazinière quasi neuve sur le Bon Coin. Les entreprises sont également très présentes. Weldom, à Blain, offre une penderie et vend du matériel de bricolage à prix coutant. Les transports Paillusson, qui vont prochainement s’installer à La Chevallerais, déposent aspirateur, tancarville, chaine hifi, chaussures, vêtements… L’Institut Maliti donne de nombreux produits de beauté. Del’hair Coiffure et Casly Coiff proposent des coupes gratuites. GIFI à Nort sur Erdre accepte un rabais sur la facture. Intermarché à Nort sur Erdre commande carrément un frigo neuf. Enfin, côté associatif, l’Amicale Laïque participe financièrement et multiplie les démarches auprès des entreprises et particuliers pour obtenir des dons. Le club de foot FCGC propose à Vania de venir pratiquer sa passion, le ballon rond. Passiona’ Danse va également inviter le jeune garçon à l’un de ses cours. Le centre éducatif Anjorrant de Nantes fait don de meubles et matériel informatique. Tempo propose une adhésion gratuite. Le secours populaire livre de l’alimentation chaque mercredi. Bettes comme choux met en place une cagnotte pour qu’elles puissent commander chaque semaine. Bref, la solidarité est extraordinaire.
Touchées par le drapeau ukrainien
Quand on évoque cette générosité des Chevalleraisiens, les larmes montent rapidement chez Svetlana et Katia. « On voudrait exprimer notre gratitude énorme envers les habitants. Non seulement pour avoir été accueillies ici, mais aussi pour avoir été accueillies dans un endroit si chaleureux. Tout était fait pour qu’on se sente comme dans une maison. Il y avait des jeux pour Vania, des dessins sur la porte. Même la lessive était dans le placard ! C’est beau. Au début, on voulait remercier ceux qui avaient participé. Mais on s’est rendu compte qu’il y avait beaucoup de monde à avoir apporté son aide ».
Le drapeau ukrainien cousu par une Chevalleraisienne et qui flotte sur le fronton de la mairie a également fait son effet. « Ça nous touche énormément, explique Svetlana en portant sa main sur le cœur. Je vais tous les jours le regarder. Ça donne un peu de force de le voir. »
Même si elles aspirent à rentrer chez elles dès que la guerre s’arrêtera, mère et filles ne comptent pas rester longtemps inactives à La Chevallerais. « Ce n’est pas du tout dans la mentalité des femmes ukrainiennes de ne pas travailler » assure Olena Zakharenko, Ukrainienne d’origine et professeur d’anglais au collège Saint-Laurent de Blain (un grand merci à elle pour la traduction de cet entretien). Katia confirme d’ailleurs ses propos : « Pour l’instant, on apprend le français, on fait des promenades, mais on tient à être actives, à reprendre petit à petit le contrôle de nos vies. On ne veut pas être un poids pour les gens. On ne peut plus rien planifier, on vit au jour le jour mais on aimerait travailler, même pour quelques mois ». Dans « la vie d’avant », Katia était juriste dans une entreprise nationale qui fournit l’eau. Svetlana, très jeune mamie, travaillait dans une administration.
De son côté, Vania, du haut de ses 5 ans, est forcément affecté par ce qu’il a vécu. « On évite d’évoquer le sujet de la guerre devant lui car il comprend tout, nous dit Katia. Il se réveille souvent la nuit en criant ». L’intégration est pourtant facilitée par l’accueil qui lui a été réservé. Des enfants sont venus jouer au foot avec lui. Dans deux semaines, il fera sa rentrée à L’Ecol’eau, en moyenne section. En attendant, il a découvert le centre de loisirs lundi matin. A priori, il a beaucoup aimé. Entre deux parties de foot, il a d’ailleurs offert une fleur à une petite fille…